Première condamnation de la France par la CEDH pour contrôle d’identité discriminatoire

Six requérants d’origine africaine ou « nord-africaine » se sont présentés devant la Cour européenne des droits de l’Homme après avoir fait l’objet entre 2011 et 2012 de contrôles d’identité qu’ils qualifient de « profilage racial » ou encore de « contrôles au faciès ».  

Se fondant sur les articles 14 (interdiction de discrimination) et 8 (Droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’Homme, la Cour n’a pas établi de violation légale concernant cinq des six requérants.  

S’agissant du sixième qui a fait l’objet de trois contrôles d’identité en l’espace de 10 jours, la Cour a condamné la France et a considéré des circonstances à savoir : l’absence de base légale d’un contrôle d’identité et les rapports et données statistiques officiels, qu’il est possible d’établir un faisceau d’indices graves, précis et concordants de nature à « créer une présomption de discrimination ».    

Cette présomption est importante puisqu’elle renverse la charge de la preuve auprès du gouvernement français qui doit justifier objectivement et raisonnablement la nécessité de ces contrôles, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.  

Mais cela n’est pas tout, car la Cour se réfère sans se cacher aux rapports et données statistiques officiels. Or, cette décision rendue le 26 juin 2025 a été précédée de deux jours par une enquête du Défenseur des droits (Enquête sur l’accès aux droits, 2ème édition, volume 1, juin 2025) confirmant la persistance des contrôles d’identité discriminatoire par les forces de l’ordre qui résulte de l’origine réelle ou supposée de la personne contrôlée.  

Cette décision n’est pour autant pas étonnante car elle s’inscrit parfaitement dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’État qui avait lui aussi reconnu la pratique de contrôle d’identité discriminatoire (CE, 11 octobre 2023, n° 454836), mais également de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, elle-même (Basu c. Allemagne, le 18 octobre 2022).  

Alors, sachant que cette décision ne fait qu’enfoncer des portes ouvertes, nous pouvons légitimement nous questionner quant à son apport, sera-t-elle plus efficace que l’arrêt rendu par le Conseil d’État ?   Une question primordiale sachant que 19% des personnes contrôlées et interrogées par le Défenseur des droits rapportent un comportement non professionnel des agents (tutoiement, insultes, provocation…).  

Ainsi, dirigeons-nous vers une énième réforme du code de procédure pénale et ses articles 78-2 et suivants ou vers un durcissement des décisions des tribunaux français ?   Les réponses à ces questions permettront enfin d’aborder le problème de la confiance en l’institution policière qui ne fait que décliner… À juste titre ?  

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