l'Article 1254 du code civil, l'innovation répressive de la faute lucrative

La faute lucrative vise à sanctionner les comportements économiques privilégiant le profit au mépris du droit, de l’éthique et des droits fondamentaux.

L’introduction de l’article 1254 du code civil consacre une sanction confiscatoire destinée à dissuader ces pratiques.

Cet article introduit une sanction spécifique pour la faute lucrative, visant à dépasser le principe classique de simple réparation du dommage. Toutefois, un débat demeure sur la définition précise de cette faute et sur le choix d’une sanction adaptée, balançant entre une approche dissuasive, une approche punitive ou réparatrice.

Un problème se pose, le cas où l'auteur d'un manquement ou d'une violation profiterait de son acte illégal, car les gains générés excèdent largement les dommages et intérêts qu'il serait contraint de verser à la victime. Donc, la simple réparation du dommage n'est plus suffisante, car elle ne dissuade pas le fautif de recommencer s'il peut s'enrichir malgré tout.

La faute lucrative est caractérisée par trois éléments. Le légal : la violation d'une obligation légale, souvent d'intérêt collectif. Le moral : la volonté délibérée du fautif de s'enrichir, en considérant les dommages et intérêts comme un simple risque d'entreprise plutôt qu'une sanction. Matériel : l'existence concrète d'un profit ou d'un gain obtenu illégalement.

La nature et la gravité de la faute lucrative, la qualifient d'acte prémédité opportun, cela ne relève pas de la « méchanceté » en soit , mais démontre une absence d'empathie chez ses auteurs. En effet, c’est un acte réfléchit et égoïste dont le but premier est l’argent.

La sanction de la faute lucrative insiste sur deux point. Le premier est le profit retiré qui est le critère central pour calculer la sanction. On cherche à savoir combien l’auteur a gagné grâce à sa faute afin que ce montant lui soit retiré. Le deuxième est la gravité et la probabilité de la faute, où le juge peut adapter la sanction selon la gravité du manquement et la probabilité de récidives de la part de l’auteur.

Par exemple, dans l’affaire « Dieselgate », pour calculer le profit illicite de Volkswagen, on compare ce que l’entreprise a réellement gagné en vendant des voitures non conformes avec ce qu’elle aurait gagné si elle avait respecté les normes. Cela permet d’évaluer un « surprofit » qui doit être confisqué par la répression de la faute lucrative.

Au-delà du simple retrait du profit, le juge doit aussi tenir compte de la gravité de la faute pour fixer la sanction. La gravité s’apprécie selon la nature du comportement, son impact, et les circonstances. Par exemple, si la faute a été commise de façon cachée et organisée, elle est dite plus grave. Plus la manœuvre est dissimulée, plus la sanction est lourde car l’auteur a volontairement contourné les règles minutieusement.

Le raisonnement économique inspiré de Gary Becker (économiste néolibéral) est que la sanction doit aussi être proportionnelle à la probabilité que la fraude soit découverte. Donc, si une faute a peu de chances d’être découverte, alors la sanction doit être plus élevée pour rester plus dissuasive. Sinon, l’entreprise aurait encore un intérêt à enfreindre la loi.

De plus, cette sanction a un but préventif et dissuasif qui vise à montrer que fraude ou tirer profit d’une faute peut avoir de lourdes conséquences. L’objectif est de dissuader les dirigeants des sociétés à des actes illégaux et non pas d’affaiblir les entreprises.

Il est important de souligner que la sanction doit être supportée personnellement par l’auteur afin qu’elle soit dissuasive et que l’Etat puisse agir pour préserver l’ordre public économique

L’obligation de motivation du juge doit être renforcée, raisonnée et professionnelle. Or le texte légal limite aujourd’hui le juge à une simple «faculté» affaiblissant donc l’efficacité du dispositif. Confisquer ce profit illicite va permettre de restaurer l’ordre public économique et donc le Juge devrait relever d’office la qualification de faute lucrative et prononcer la sanction confiscatoire.

En somme, cette évolution juridique marque une dépénalisation croissante du droit des affaires, en apportant une réponse civile à des comportements répréhensibles.

Le Code civil, à travers son article 1254, devra être appliqué avec discernement dès que la qualification de faute lucrative sera démontrée.

Enfin, ce texte incarne une justice tournée vers la prévention et vers la réparation, il appelle les professionnels du droit à intégrer ces enjeux dans leur raisonnement.  

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